Jean-Claude Junker, le nouvel homme fort de l’Union Européenne.
La présentation le 10 septembre dernier de la nouvelle Commission Européenne par son Président Jean-Claude Juncker, ancien Premier Ministre luxembourgeois, ancien président de l’Eurogroupe et cofondateur de l’euro, a lancé la dernière étape d’un long processus, commencé en mai dernier, visant au renouvellement complet des institutions européennes.

Cette relève intervient alors qu’avec une conjoncture économique très dégradée, une poussée du régionalisme et du séparatisme dans certains Etats Membres, un sentiment de vulnérabilité vis-à-vis du monde extérieur, que ce soit du point de vue économique, migratoire ou sécuritaire, le tout sur fond de montée de l’euroscepticisme et de tentation du « grand large » du Royaume-Uni, l’Union Européenne traverse une crise existentielle qui menace les fondements même de son existence, appelant à une réponse cohérente et unie. Plusieurs éléments sont néanmoins porteurs d’espoir et Jean-Claude Junker pourrait à lui seul les symboliser. Tout d’abord, les conditions dans lesquelles il est arrivé à la tête de la Commission lui donnent une légitimité et un poids politique propres dont son prédécesseur Manuel Barroso n’a jamais bénéficié. C’est en effet le Parlement Européen, élu en mai dernier, qui a imposé aux États Membres de placer à la tête de la Commission celui que David Cameron surnommait « l’homme du passé ». Affranchi en partie de la tutelle des États, il a pu de façon symbolique affirmer qu’il « avait donné des portefeuilles à des hommes et des femmes, et non à des pays ».
Par ailleurs, les choix audacieux faits pour son collège de Commissaires, l’architecture originale et fonctionnelle proposée, le programme et les lettres de mission précis envoyés, laissent à penser que l’ancien Premier Ministre luxembourgeois a pris la mesure des défis multiformes qui s’imposent à lui. Jean-Claude Junker a imposé ses priorités et a, en adéquation avec les objectifs de la Présidence italienne et les récents appels de la BCE en faveur d’un soutien à l’économie réelle, annoncé que l’une des premières initiatives concrètes de la Commission serait la mise en place d’un plan d’investissement de 300 milliards d’euros sur trois ans. Si de nombreuses questions restent en suspens, comme l’articulation opérationnelle réelle entre les Commissaires et les Vice-présidents, si les personnalités choisies à certains postes sensibles peuvent être sujettes à discussions et doivent encore être auditionnées par les députés européens, si le Conseil et le Parlement auront également leur mot à dire sur la mise en place des priorités européennes, les premières dispositions prises par l’ancien président de l’Eurogroupe ont démontré que celui-ci s’inscrivait pleinement au centre du jeu institutionnel européen. Et qu’il représentait, peut-être, l’avenir.

Lettre Européenne de l’AFTI n°13 à télécharger