Bien qu’encore incertaine et porteuse de risques, la situation macroéconomique qui prévaut à l’issue de l’exercice 2014 autorise un optimisme prudent. En premier lieu, la Commission européenne a révisé à la hausse les perspectives de croissance dans l’Union pour 2015 ; pour sa part, le Conseil a approuvé le lancement du plan d’investissements de 315 milliards d’euros pour la période 2015-2017. Par ailleurs, la croissance devrait se poursuivre cette année aux États-Unis. Cela étant, les autres régions du monde, dont la Chine, devraient continuer à connaître un ralentissement de l’activité.

Six années ont passé depuis le déclenchement de la crise qui a remis en question tous les modèles économiques. Cette crise a également façonné le nouvel environnement de l’industrie financière. En effet, la plus grande partie de l’arsenal juridique européen a été consacrée depuis 2008 à l’adoption de mesures d’adaptation à ce monde nouveau. Les objectifs poursuivis par les législateurs étaient triples :
• mieux protéger l’investisseur final ;
• veiller à une plus grande transparence des marchés ;
• et rechercher une harmonisation progressive des pratiques.
Dans ce contexte, l’année 2014 a enregistré un niveau encore très élevé d’initiatives intéressant le post-marché.
Plusieurs textes majeurs touchant la gestion d’actifs et le règlement/livraison ont ainsi été publiés, comme la directive MIF II/MIFIR et les rapports sur le redressement et la résolution des infrastructures de marchés, adoptés tels la directive UCITS V et le règlement CSD, ou encore entrés en vigueur à l’image de la directive AIFM.
Il faut également signaler comme faits marquants l’harmonisation à T+2 du cycle de règlement/livraison des titres en Europe, prévue par le règlement CSD, et réalisée par anticipation pendant le weekend du 4 et 5 octobre 2014 à l’initiative de la Place de Paris. Il s’agit d’un cas exemplaire qui a vu l’Europe migrer d’un seul mouvement.
L’harmonisation européenne des standards sur les OST est un projet qui s’inscrit dans la durée. Trois étapes le jalonnent. La première a été franchie le 18 novembre 2013 avec l’automatisation des annonces d’opérations, la seconde intervient le 28 mars 2015 et elle concerne les opérations obligatoires. La dernière, assez lointaine, T2S oblige, se situera le 12 septembre 2016 et concernera les opérations électives.
La plus importante migration 2014 pour le post-marché a concerné AIFMD. Il s’agit en effet d’un texte d’une grande portée et qui se traduit par des aménagements très sensibles en Europe, sans doute moins en France compte tenu de notre niveau déjà très élevé d’exigence en matière réglementaire. Voulue par le législateur pour répondre au besoin de réglementation de certains produits financiers, cette réforme fixe enfin les missions et responsabilités du dépositaire et nous a conduits à travailler en étroite concertation avec plusieurs associations de gestionnaires. Des textes en ont découlé et un groupe de travail lui a été consacré.
Le domaine fiscal a été très présent l’année dernière avec la mise en œuvre de FATCA et l’obligation d’identification par les teneurs de compte des nouveaux comptes ouverts à des non-résidents américains, avec le reporting complémentaire à fournir à l’OCDE, avec enfin la signature d’accords bilatéraux entre 49 pays pour l’échange automatique de données fiscales.
Sur un plan général, la crise a introduit une nouvelle obligation pérenne qui consiste à transmettre aux régulateurs de plus en plus de données de marchés pour permettre une évaluation précise de la situation. Quasiment chaque texte a désormais sa composante Market Data. Au-delà du besoin légitime en la matière, il faut signaler le coût de cette obligation pour l’industrie.
Le règlement EMIR, entré en vigueur le 16 août 2012, a fait l’objet en 2014 de trois textes complémentaires (règlements délégués, décisions d’équivalence, normes techniques).
L’adoption par le Conseil de l’Union européenne le 23 juillet 2014 du règlement sur les dépositaires centraux de titres (CSDR) traduit par ailleurs la volonté d’accroître la sécurité et la résilience de l’ensemble du système. Plusieurs orientations en découlent : discipline de règlement et règles communes aux CSD, dématérialisation des titres, harmonisation des délais de règlement/livraison en Europe.
La Commission européenne avait proposé à l’automne 2011 la révision de la directive MIF pour améliorer l’efficience des marchés financiers par une meilleure résilience, une plus grande transparence et une protection renforcée des investisseurs. L’importance du sujet nous a conduits à créer deux sous-groupes de travail en charge respectivement de la protection des avoirs clients et du reporting des transactions.
Ces trois textes (EMIR, CSDR, MIFID) constituent un ensemble commun à l’échelle de l’Europe destiné à couvrir les infrastructures de marché à caractère systémique.
L’année 2015 sera dominée par la mise en œuvre de Target 2 Securities, dont la première vague interviendra le 22 juin. Réforme centrale dans la construction du système financier européen, Target 2 Securities rationalisera le règlement/livraison en Europe, lequel disposera d’une plateforme commune en euros. Des bouleversements sont à prévoir pour l’industrie du post-marché, qui peut en attendre une réduction des coûts de règlement/livraison et une meilleure couverture de certains risques.
Première initiative d’envergure en 2015, l’annonce par la Commission européenne de la création d’une Union pour les Marchés de Capitaux à l’horizon 2019 devrait être le principal chantier de son mandat. Après une législature entièrement consacrée à la régulation en réponse à la crise, la nouvelle Commission donne clairement la priorité à la croissance, en décidant de lever les obstacles au financement des entreprises européennes et notamment les PME. Dans ce contexte, la Commission européenne a publié le 18 février un Livre vert dont certains des trente domaines visés concernent le post-marché tels la titrisation, le collatéral, le droit des titres, le droit de la faillite, l’harmonisation fiscale… Les acteurs concernés par ce document ont jusqu’au 13 mai pour répondre.
France Post-Marché s’est naturellement inscrite dans cette mouvance et y a consacré d’importants moyens. Comme chaque année, nos groupes de travail et observatoires se sont efforcés de publier l’exégèse de leurs travaux destinés à leurs métiers, dans et hors le post-marché. Je voudrais signaler à cet égard notre volonté de diffuser de plus en plus largement ces documents, dont nous adaptons la rédaction pour les rendre lisibles par la presse et la clientèle, via notre site internet qui rendra désormais cette diffusion publique. Il est permis d’espérer que le renouvellement des institutions européennes intervenu à l’issue d’une législature marquée par la crise financière coïncide avec l’ouverture d’un nouveau cycle. Les travaux en cours devront toutefois être achevés, une mise en cohérence devra être engagée, après quoi le rythme de diffusion des textes nouveaux devrait se réduire.

Marcel Roncin, Président de France Post-Marché

Rapport annuel 2014 – à télécharger