C’est la première fois que je rédige l’éditorial du rapport annuel de notre association mais, rassurez-vous, je n’ai pas le vertige de la feuille blanche… Bien au contraire car cette année 2021 a été particulièrement bien remplie.
Cet éditorial ne pourra qu’être injuste envers l’engagement de nos membres dans les groupes de travail, envers leurs efforts considérables pour analyser et faire avancer nos meilleures pratiques et plus largement envers leur contribution souvent invisible pour un post-marché résilient, efficace et moderne. Je ne pourrai malheureusement pas citer tous ces travaux mais vous enjoins donc à lire attentivement les rapports de nos groupes et ce sera une bonne façon de reconnaître et d’apprécier leur travail. Merci à eux !
Après une année 2020 passablement agitée, la COVID fait maintenant partie de notre univers et nous avons appris, vaccin après vaccin et mutation après mutation, à vivre avec ce virus. Cette nouvelle normalité n’a pas empêché France Post-Marché de mener des travaux courant 2021 sur le retour d’expérience pour le post-marché en France de cette pandémie. Les enseignements sont bien sûr multiples mais le principal a été la formidable capacité d’adaptation de notre industrie et de la résilience des équipes qui la compose. La « chasse au papier » a été renouvelée, le papier, qui apparaissait auparavant comme une source d’inefficacité est devenu de plus synonyme de risque. Des travaux ont été menés notamment avec l’administration fiscale afin de digitaliser les échanges et la signature digitale est aujourd’hui tellement rentrée dans les habitudes de travail que l’on peut se demander comment nous faisions auparavant. Les travaux conjoints avec l’Association Française de la Gestion ont aussi permis de faire évoluer deux éléments de fragilité en temps de crise. Une première market practice a entériné le passage à une validation implicite des valeurs liquidatives par les gérants ce qui gagne un temps précieux dans les processus comptables. Une deuxième practice est aussi venue encadrer le recalcul des valeurs liquidatives en l’absence de motif impérieux.
L’agitation des marchés de 2020 a d’autre part souligné l’impérieuse nécessité pour le régulateur de disposer d’une panoplie d’outils permettant de réguler les rachats de parts de fonds lors de crises pouvant impacter la liquidité des fonds. Ces dispositifs étant essentiellement déjà prévus dans les textes législatifs, l’enjeu se situe plus en leur adoption par le marché et dans notre capacité à nous assurer que les flux opérationnels soient efficaces et robustes. Une consultation a permis ainsi un déploiement fluide de ces dispositifs.
Les épargnants, forts d’une épargne de précaution importante, ont retrouvé le chemin de la bourse. Ils recherchent également plus de rendement par la diversification de leurs placements. Le support privilégié de ces investissements reste l’enveloppe fiscale du Plan d’Epargne en Actions (PEA). Ce produit, au fonctionnement très encadré dans l’intérêt du client, fait l’objet de toute l’attention des teneurs de comptes conservateurs. Ces derniers en facilitent notamment le transfert entre établissements bancaires dans lesquels se développe également l’accueil de titres non cotés, autre tendance forte du développement de l’épargne.
L’actualité réglementaire a été marquée, quant à elle, par l’entrée en vigueur de la Shareholders Right Directive 2 (« SRD2 »). Une dimension importante de SRD2 est centrée sur la digitalisation des annonces des assemblées générales ainsi que des votes envoyés aux centralisateurs (et selon la plaisanterie bien connue, digitalisation ne veut pas dire envoyer un courriel !). La préscience de nos prédécesseurs à France Post-Marché de lancer Votaccess, il y a maintenant une dizaine d’années, s’est trouvée pleinement validée et a permis à la place de Paris d’aborder SRD2 avec une infrastructure moderne et rodée. Les circuits d’identification des actionnaires sont aussi profondément revus et se mettent en place avec un certain nombre de complexités autour de la profondeur des réponses ainsi que des schémas techniques des intermédiaires.
CSDR Central Securities Depository Regulation), et notamment l’introduction du régime des pénalités (pouvant se transformer en buy-ins) lors de la défaillance du dénouement d’une opération, a été l’objet de nombreux travaux des membres de l’AFTI. L’industrie a réussi à convaincre les régulateurs européens de la grande complexité du mécanisme de buy-ins pour un effet que nous pensions illusoire et coûteux, ce mécanisme ayant été finalement écarté de l’application de CSDR. Le traitement fiscal des pénalités a pu être éclairci après un dialogue constructif et fructueux avec les autorités fiscales françaises.
La grande transformation de notre société vers un monde plus durable avec une prise en compte généralisée des critères Environnementaux, Sociétaux et de Gouvernance («ESG») est bien entendu aussi d’application dans le monde du post-marché. L’application des critères ESG dans le monde de la gestion « percole » directement dans nos travaux avec notamment un sujet autour de l’accès à de nouvelles données ainsi que sur la définition du périmètre d’intervention sur la banque dépositaire. Nous avons lancé un nouveau forum multidisciplinaire qui rassemble des représentants de tout notre champ d’intervention.
Votre association est aussi résolument tournée vers l’avenir et notre équipe Innovation s’implique énergiquement dans les projets de Blockchain ainsi que dans l’agenda législatif très dense sur les crypto-actifs. La Place de Paris peut s’enorgueillir de disposer depuis cette année de RegistrAccess qui permet de basculer sur une Blockchain l’enregistrement des transactions sur des actions non-cotées (les Ordres De Mouvement plus connus sous leur sigle «ODM »). Cette solution novatrice portée par la société SLIB et France Post-Marché règle une vieille douleur de la place sur les processus très manuels relatifs aux ODM.
France Post-Marché a aussi continué d’assumer sa fonction de pédagogie sur le post-marché au travers de partenariats très vivaces avec 6 universités. Nous avons aussi tenu de nombreuses conférences afin de maintenir un dialogue entre nos membres et plus généralement avec tous ceux qui s’intéressent au post-marché. Le distanciel nous procure une grande souplesse pour l’organisation de ces événements que nous panacherons toutefois à l’avenir avec quelques événements auxquels nous inviterons nos membres à se rendre physiquement.
Votre Déléguée Générale et votre Président ont aussi maintenu un dialogue régulier avec l’AMF et le Trésor ainsi qu’avec des d’associations de la place avec lesquelles nous partageons l’écosystème de la Place de Paris. Le dialogue est toujours intéressant et riche d’un angle de vue différent sur nos sujets.
Cette année nous avons choisi de centrer ce rapport annuel sur les Infrastructures de marché. Vous y trouverez sous la plume d’Euroclear, d’Euronext et de LCH Clearnet des entretiens qui vous permettront de mieux appréhender les profondes mutations en cours dans notre industrie.
Merci de votre soutien,
Pierre Jond
Président de l’AFTI