Cet Amphi de France Post-Marché est consacré à un évènement majeur pour la Place de Paris, à savoir la migration réussie du marché français à TARGET2-Securities (T2S). Nous ne devons pas oublier qu’avec Euroclear, ce sont trois marchés qui ont migré (le marché belge des actions, le marché hollandais et le marché français) augmentant considérablement les volumes traités sur la plateforme T2S. Les volumes traités atteignent aujourd’hui près de 40 % du volume attendu après la migration de l’ensemble des marchés. C’est aussi l’ensemble des instruments financiers (produits de taux, actions et fonds) qui sont maintenant traités sur la plateforme T2S.
Les plus anciens d’entre nous ont connu les premières réunions à Francfort en 2006 au cours desquelles ceux-là mêmes qui se plaignaient de la fragmentation des marchés et des coûts élevés de règlement/livraison transfrontière depuis des années, remettaient en cause la pertinence d’un tel projet mais aussi doutaient de la capacité de l’Eurosystème à le réaliser alors même qu’il venait de mettre en œuvre avec succès la plateforme TARGET2 pour le traitement des paiements en euro. En outre, un certain nombre d’entre eux dénonçaient le coût du projet en oubliant les investissements considérables que chacun des marchés avait à financer tous les cinq ans pour renouveler des plateformes devenues obsolètes. Le marché français, et plus généralement, les marchés de la zone Euronext, ont été de véritables moteurs dès le début pour faire en sorte que ce projet voie le jour.
Je crois que nous pouvons nous féliciter de voir que l’Eurosystème a réussi à mener à bien un projet dont tout le monde reconnaît aujourd’hui l’intérêt en matière de consolidation, d’harmonisation, de réduction des risques et bien sûr de réduction des coûts.
Je ne vais pas vous révéler un secret mais lorsqu’Euroclear a annoncé qu’il ne serait pas prêt en mars 2016 comme prévu, cela a provoqué de vives réactions de la part de certains acteurs dont quelques-uns n’étaient pas si mécontents de pouvoir bénéficier, eux aussi, d’un report de quelques mois. Et même si ce report a causé de réels problèmes à l’Eurosystème lorsqu’il a fallu réorganiser l’ensemble du planning de migration des autres vagues, il s’est avéré qu’il s’agissait d’une sage décision qui a permis à Euroclear de migrer dans des conditions optimales de sécurité.
Je voudrais également souligner la qualité de préparation de l’ensemble des établissements concernés par ce projet.
Je voudrais enfin remercier Vincent Bonnier qui a été le directeur du projet T2S pour les quatre banques centrales (dites les 4CB) pendant de longues années et qui est donc pour beaucoup dans le succès de ce projet, ô combien difficile, tant pour des raisons politiques à l’origine que pour des raisons techniques par la suite.
Les prochaines étapes sont, premièrement en février 2017, la migration de la vague 4 avec, entre autres, l’Allemagne qui est un marché important en volume, et ensuite en septembre 2017, celle de la dernière vague avec la Finlande pour le groupe Euroclear mais aussi l’Espagne, à laquelle il faudra porter une attention particulière.
Quelles pourraient être les futures évolutions ?
Il est important de rappeler que la plateforme T2S autorise également le dénouement dans des devises autres que l’euro. Ainsi, il n’est pas exclu d’envisager que d’autres marchés en Europe (mais pas seulement) souhaitent rejoindre T2S plutôt que d’investir dans une nouvelle plateforme au moment où ils seront confrontés à l’obsolescence de leur infrastructure actuelle. Cela nécessite certes un cadre juridique approprié, mais rien d’insurmontable. Un rapprochement des plateformes TARGET2 et TARGET2-Securities (T2S) permettrait d’améliorer l’efficience économique, technique et opérationnelle, tout en facilitant les capacités d’investir dans les nouvelles technologies. L’amélioration de la gestion du collatéral avec la mise en place d’un service permettant d’optimiser le collatéral apporterait beaucoup d’efficience.
En conclusion, même si l’Europe est souvent critiquée, nous pouvons nous enorgueillir de son efficacité en matière d’infrastructures, que ce soit dans le monde des paiements (TARGET2) ou des autres produits financiers (T2S).
Alain Pochet, Vice-président de France Post-Marché