Je vous souhaite la bienvenue à cette première conférence de l’année organisée en partenariat avec la Fédération Bancaire Française et l’AMAFI, consacrée aux chambres de compensation.

Dans sa lettre de Mission adressée le 28 octobre dernier à Pierre Fleuriot, chargé de formuler des propositions en vue de la révision en 2010 de la Directive MIF, le Ministre de l’Économie, de l’industrie et de l’emploi, écrivait : « La crise financière n’a pas seulement été une crise bancaire. L’onde de choc qu’elle a provoquée a mis en lumière les dysfonctionnements de plusieurs marchés d’instruments financiers essentiels. Dans son action pour refonder la régulation financière internationale, le G20 a souligné la nécessité de renforcer l’intégrité des marchés. Afin de réduire les risques systémiques, il a également appelé à recourir, à condition qu’elles soient robustes, aux infrastructures comme les chambres de compensation pour certains dérivés ».
De son côté, la Commission européenne, qui par ailleurs prône l’interopérabilité entre infrastructures, laquelle a pourtant montré ses limites et représenté une source de coûts sans rapport avec l’objectif recherché, a publié le 20 octobre 2009 une Communication qui annonçait les grandes lignes de la politique qu’elle entend mener en 2010 pour remédier à la problématique des marchés de dérivés de gré à gré. Parmi les mesures proposées figurent :
• la compensation des contrats de dérivés de gré à gré éligibles par le biais d’une CCP, avec l’objectif de rendre obligatoire la compensation centralisée pour les dérivés standardisés ;
• et un cadre juridique pour réglementer et surveiller les CCP (règles de fonctionnement, règles de conduite, gestion des risques…).
La Commission travaille aujourd’hui sur un projet de directive, European Market Infrastructure Legislation ou EMIL, avec la double ambition de traiter des infrastructures de Marchés – dont les chambres de compensation – et des produits dérivés. L’accent y est mis sur la nécessité de renforcer la robustesse des infrastructures pour réduire, sinon éliminer, les risques systémiques. Ce texte sera mis en consultation publique en avril/mai prochains, en vue d’une adoption par le Collège des commissaires en juillet, pour une mise en œuvre en 2012.
France Post-Marché plaide pour l’élaboration de deux textes, pour distinguer la démarche « service » représentée par l’aspect infrastructure, de celle relative aux produits – les dérivés OTC.
Pour sa part, le Conseil des Gouverneurs de la Banque Centrale Européenne a rappelé qu’il attachait une grande importance au fait de disposer d’une chambre de compensation, au minimum, installée dans la zone euro, pour traiter les dérivés OTC libellés en euros. Enfin, le Conseil ECOFIN a demandé le 2 décembre dernier que ces dérivés soient compensés par des contreparties centrales d’ici la fin 2012 au plus tard.
Depuis une trentaine d’années, les CCP ont été appelées à jouer un rôle grandissant dans les marchés organisés et sur un certain nombre de produits de plus en plus sophistiqués. Par ailleurs, l’intégration européenne passe aussi par un effort de consolidation des CCP, dont l’efficience est un atout incontestable pour une place financière. Ainsi, avec la crise, il est apparu que le meilleur traitement prudentiel des dérivés de crédit serait obtenu par l’emploi d’une contrepartie centrale de compensation supervisée par la Banque Centrale émettrice de la monnaie dans laquelle sont libellés les dérivés.
À cet égard les chambres de compensation peuvent être classées comme étant d’importance systémique. Elles sont des éléments déterminants dans le maintien de la stabilité financière en permettant aux opérateurs de prévenir les risques systémiques. Dans la chaîne des activités post-marché, elles sont le lien indispensable avec le règlement/livraison, et assurent la sécurité des membres de marché. Nous l’avons bien vu lors de la faillite de Lehman où l’accès direct à la liquidité de la monnaie banque centrale, la résilience de notre CCP et l’excellence du risk management ont joué un rôle essentiel.
L’emploi d’une CCP permet également de bénéficier d’une meilleure connaissance des volumes échangés.
Les observateurs s’interrogent sur le paysage qui va progressivement prendre forme, sous la pression des régulateurs, comme nous l’avons vu, mais aussi du marché, à l’issue de la plus grande crise financière rencontrée depuis 80 ans. Nous verrons lors de cette conférence quelles sont les principales chambres de compensation déjà en place et celles qui entrent en lice.

Marcel Roncin, Président de France Post-Marché

Spécial Conférence n° 36 – Les CCP : quelles stratégies ? – à télécharger